Un réseau pour protéger la santé animale en péril au Sud-Kivu

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Comme tous les jours, Charline Nabintu (26 ans) et Safi Ngomora (28 ans) sillonnent les villages les plus reculés du Sud-Kivu. Sur un vélo ou au volant d’une moto, elles ont pour mission de soigner le bétail des éleveurs. Avec tous les risques que cela implique, dans cette région en proie à l’insécurité.

Mais Charline et Safi n’ont jamais rien connu d’autre. Depuis 25 ans, des dizaines de groupes armés sévissent à l’Est du Congo. Les violences sont le lot quotidien de la population, en particulier des femmes. Des milliers d’entre elles ont déjà été victimes de viol, utilisé comme arme de guerre.

Contrairement au Nord-Kivu et à l’Ituri voisins, le Sud-Kivu n’est pas en état de siège, mais la situation n’y est pas moins délicate. A elle seule, la région compte plus d’1,2 millions de déplacés internes et près de 80 000 réfugiés. A cause des conflits, de la récession et des effets prolongés de la pandémie, le prix des denrées alimentaires atteint actuellement des records. Plus d’un million d’habitants sont aujourd’hui menacés par une crise alimentaire.

La santé animale en péril

A l’Est du Congo, l’insécurité fait fuir le personnel vétérinaire et les éleveurs n’ont d’autre choix que de soigner le bétail eux-mêmes. © Arlette Bashizi

Malgré l’importance du bétail pour la population, le système de santé animale est défaillant, et la santé animale en péril. Face à l’incertitude, au mauvais état des routes et aux difficultés d’approvisionnement en médicaments, le personnel soignant qualifié préfère souvent s’installer dans des régions plus stables. Résultat : les éleveurs de l’Est du Congo se voient contraints de soigner eux-mêmes leur bétail.

C’était aussi le cas de Charline et de sa famille, avant qu’elle ne suive une formation d’agente de santé animale : « Je passais beaucoup de temps à soigner les vaches de mon père, » explique la jeune femme, « mais je n’avais aucune formation. » Une situation qui n’est pourtant pas sans risque, et que les éleveurs paient au prix fort. « Avant, les éleveurs traitaient leurs animaux sans même savoir de quoi ils souffraient. Il leur arrivait de mal doser les médicaments,» poursuit Charline Nabintu. « Evidemment, le taux de mortalité du bétail était très élevé. »

Mais le danger ne se limite pas aux animaux ; il menace aussi directement les populations. En cas de mauvais traitement, les animaux peuvent leur transmettre des maladies, comme par exemple la tuberculose ou d’autres zoonoses. Sans parler des risques liés à la mauvaise utilisation des antibiotiques, responsable de 3500 décès par jour dans le monde.

Un réseau de santé animale en pleine expansion

Charline Nabintu fait partie du réseau de santé animale mis en place par VSF-B au Sud-Kivu © Arlette Bashizi

Aujourd’hui, Charline Nabintu lutte contre ces problèmes au quotidien, tout comme le docteur Ngomora. Toutes les deux ont bénéficié de l’accompagnement de Vétérinaires Sans Frontières dans la mise en place de services vétérinaires privés de proximité. Un réseau qui compte pas moins de 290 agents de santé animale au Sud-Kivu et au Tanganyika, supervisés par 22 vétérinaires. Et qui est en pleine expansion : cette année, nous prévoyons de renforcer ces services en formant 100 nouveaux agents autour du parc national Kahuzi Biega. Une chance inespérée pour les éleveurs du Sud-Kivu, où les opportunités professionnelles sont rares.

Cela fait plus de deux ans que Charline a été choisie par son village pour bénéficier de la formation. Elle a ensuite reçu un vélo, un pulvérisateur et des médicaments pour démarrer son activité. Une chance dont elle n’est pas la seule à profiter : « Depuis que Vétérinaires Sans Frontières intervient dans l’élevage ici à Luvungi, je constate un vrai changement positif. Lorsqu’un éleveur a un problème avec son bétail, il nous appelle et grâce à notre formation, nous pouvons lui apporter le traitement adéquat. Si on se retrouve face à un cas qui nous dépasse, nous appelons le vétérinaire privé et c’est lui qui intervient. Actuellement, le taux de mortalité du bétail a baissé par rapport aux années précédentes. »

A une centaine de kilomètres, du côté de Katana, le docteur Safi Ngomora observe les mêmes progrès dans la zone qu’elle supervise : « J’ai vu une nette amélioration suite aux formations organisées par Vétérinaires Sans Frontières en faveur des éleveurs et des agents de santé animale. Aujourd’hui, la majorité des éleveurs ont pris conscience qu’ils ont tout à gagner en prenant bien soin de leur bétail. »

Aidez-nous à renforcer la santé animale au Sud-Kivu

Cette année, 100 Congolais auront l’opportunité de devenir agents communautaires de santé animale au Sud-Kivu. Ces hommes et ces femmes viendront renforcer les 290 agents déjà actifs au Sud-Kivu et au Tanganyika.

Faites un don pour nous aider à développer notre réseau de santé animale et garantir de meilleurs soins au bétail de la région.

En savoir plus

Découvrez le fonctionnement et l’impact des services vétérinaires privés de proximité mis en place par nos équipes en RD Congo: téléchargez notre fiche d’information.