Et si nous repensions nos relations avec les animaux et la nature ?

Actualités

La crise du coronavirus est d’une ampleur inédite. Partout dans le monde, les pays ordonnent le confinement et ferment leurs espaces aériens. Pendant que nous restons cloîtrés chez nous, ne serait-il pas bon de réfléchir sur l’origine du COVID-19 et sur la manière de prévenir ce type de situation à l’avenir ? Nous avions déjà connu le SRAS, Ebola et, il y a bien longtemps, la grippe espagnole. Qui sait quelle autre épidémie nous attend encore ? Que nous apprend le COVID-19 sur nos relations les uns avec les autres et avec la nature, et comment utiliser ces enseignements pour faire face à de futures épidémies ?

Du « virus chinois » à la pandémie mondiale

La première victime du COVID-19 aurait été identifiée mi-novembre dans la province chinoise de Hubei. Depuis, même Trump en a fini de le réduire à un simple « virus chinois ». Le COVID-19 est une épidémie mondiale et les scientifiques sont de plus en plus convaincus de son origine zoonotique. Les chauves-souris seraient à l’origine du virus, qui après transmission à d’autres animaux, aurait ensuite infecté les humains. Entre-temps, des centaines de milliers de personnes l’ont contracté et des dizaines de milliers ont déjà perdu la vie. Et selon les experts, le « pic » n’est pas encore atteint.

Vulnérabilité

S’il est encore beaucoup trop tôt pour tirer des conclusions, peut-être pouvons-nous profiter du confinement pour réfléchir à certaines choses. L’enseignement le plus évident de la crise actuelle est sans doute la vulnérabilité de notre système. L’intensité et la rapidité avec laquelle le COVID-19 s’est imposé dans le monde sont inimaginables. En l’espace de quelques semaines, la vie publique s’est retrouvée au point mort, un pan de l’économie est à l’arrêt et nous revoyons tous  – après avoir fait nos stocks de pâtes et de papier de toilette – nos projets pour les mois à venir. Mais pourquoi sommes-nous devenus si vulnérables, et que nous apprend cette crise ?

Un monde globalisé

La globalisation est un fait avéré depuis longtemps. Les personnes, les marchandises et les animaux sont en mouvement constant sur la planète, et chaque région se spécialise dans une activité économique propre. Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que le virus se soit propagé très rapidement. Mais interrogeons-nous un instant : notre système mondialisé est-il vraiment indispensable ? Avons-nous vraiment besoin de partir en vacances trois fois par an, toujours plus loin de chez nous ? Et surtout, est-il normal que notre nourriture fasse le tour du monde ? Notre système alimentaire est emblématique de cette hyper-mondialisation : nous mangeons des haricots verts du Kenya, nos crevettes sont décortiquées au Maroc et notre viande de poulet est vendue sur les marchés ghanéen et congolais. Sans parler de l’impact de ce système sur la souveraineté alimentaire, quels sont les risques sanitaires de la circulation d’animaux et de denrées alimentaires sur de si longues distances ? Pouvons-nous vraiment les évaluer correctement ?

Les maladies zoonotiques

Le COVID-19 nous force non seulement à remettre en question la globalisation, mais aussi la façon dont nous interagissons avec les animaux et la nature. Ce virus serait, comme le MERS et le SRAS avant lui, une maladie zoonotique, c’est-à-dire transmissible de l’animal à l’homme. L’épidémie actuelle a frappé beaucoup de Belges comme un coup de tonnerre. Pourtant, à l’échelle mondiale, environ 60 % des maladies infectieuses connues chez l’homme proviennent des animaux, tout comme 75 % des maladies émergentes. Selon l’Institut international de recherche sur l’élevage (ILRI), 13 maladies zoonotiques causent chaque année à elles seules 2,2 millions de décès. Les zoonoses représentent donc une menace majeure ; imaginez que le coronavirus et Ebola (deux zoonoses) se transforment en un seul et même virus ?

Une seule santé

Afin de souligner l’interdépendance entre les animaux, les humains et l’environnement, le concept « One Health » a été développé il y a quelques années. Il prône une stratégie multisectorielle et multidisciplinaire afin de garantir la santé des animaux et des populations dans un environnement préservé. Une nécessité que le COVID-19 nous rappelle aujourd’hui de façon particulièrement douloureuse.

Alors peut-être devrions-nous envisager la crise actuelle comme une opportunité de comprendre le lien évident qui nous lie aux animaux et à notre environnement, et de réfléchir à d’autres systèmes ? Et de cette manière, lutter non seulement contre les pandémies comme le COVID-19, mais aussi contre le changement climatique ? Une nouvelle version de la mondialisation s’impose, mais une conception différente de la santé est aussi nécessaire. Une vision qui tienne compte de notre santé, celle de nos animaux et de notre environnement dans un contexte globalisé. En espérant que cette crise planétaire puisse nous amener à réfléchir à la manière dont nous pouvons évoluer ensemble pour être plus efficaces et mieux préparés face aux épidémies futures.

Une opinion de Koen Van Troos, responsable plaidoyer pour Vétérinaires Sans Frontières