« Nous faisons face à un manque de pâturage et d’eau particulièrement exceptionnel », explique Maïga Soulemane, animateur pour Vétérinaires Sans Frontières à Seytenga, dans le Nord du Burkina Faso.
« Pour le moment, aucun animal n’est mort dans ma région, mais la situation est critique. Normalement, les éleveurs partent le matin pour faire paître le bétail et reviennent le soir. Aujourd’hui, ils sont obligés de voyager plusieurs jours pour trouver de quoi manger pour leurs animaux. »
Des barrages en dernier recours
Le Sahel connaît généralement une courte saison des pluies de juillet à septembre. Durant les huit mois suivants, les troupeaux doivent survivre en se contentant de l’herbe qui a poussé pendant ces pluies.
« Ces longues périodes de sécheresse n’ont jamais été évidentes », explique Soumaila Coulibaly, originaire d’Arbinda, au nord du Burkina Faso. « Mais ces trois dernières années, c’est de pire en pire. Dans mon village, la situation est grave. Heureusement, nous avons deux barrages dans la région, qui retiennent l’eau et approvisionnent la population. »
Soumaila suit de près la situation pastorale pour Vétérinaires Sans Frontières. « Tous les dix jours, je collecte des données sur le terrain : disponibilité et qualité du pâturage, état de l’eau dans les puits, présence éventuelle de maladies animales… » À l’aide de son smartphone, Soumaila transmet ces informations à une base de données centralisée. Après vérification, les radios communautaires diffusent les informations collectées. Si l’éleveur a des questions spécifiques, il peut aussi appeler un serveur vocal. Il lui suffit alors de suivre les instructions : “Pour des informations concernant les pâturages, tapez 1. Pour des informations sur les points d’eau, tapez 2”.
« Grâce aux nouvelles technologies, les éleveurs peuvent demander des informations à tout moment et adapter leur itinéraire. En période de crise, comme lors de la sécheresse actuelle, cela peut sauver des vies », explique Soumaila.
Deux décès
Ghislain Bambara, ingénieur en développement rural pour le Ministère des Ressources Animales et Halieutiques du Burkina Faso, confirme la gravité de la situation. « Dans l’ensemble du Sahel, la saison des pluies de 2017 a été caractérisée par une distribution inégale des précipitations dans le temps et l’espace, entraînant un déficit sur les grandes zones de pâturage et une diminution localisée de la production agricole. Le manque de pâturages et d’eau a conduit à une transhumance précoce (interne et transfrontalière) des pasteurs, avant que la récolte ne soit terminée. Cela a provoqué des conflits entre agriculteurs et éleveurs, car il arrive que les animaux détruisent une partie des récoltes de l’agriculteur. » Fin novembre 2017, 33 conflits de ce type avaient été enregistrés au Burkina Faso, causant deux décès.
L’élevage est l’une des principales activités économiques des pays sahéliens et représente entre 30 et 40 % de leur produit intérieur brut agricole. Sans mesures adéquates pour faciliter la transhumance, réhabiliter les points d’eau et approvisionner les éleveurs en aliments pour leur bétail, la région pourrait connaître une grave crise alimentaire d’ici quelques mois.
Soutenez les éleveurs du Sahel
Vétérinaires Sans Frontières vaccine les troupeaux des éleveurs au Burkina Faso, au Mali et au Niger dans l’espoir que ces animaux survivent jusqu’aux premières pluies. Parce que ces troupeaux se rassemblent au même endroit – où il y a de l’eau et de l’herbe -, ils risquent fortement d’attraper des maladies et de contaminer les autres animaux.
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