Après un long trajet en 4×4, sur des routes juste assez larges pour une mobylette, boueuses et inondées – c’est la fin de la saison des pluies –, nous attendons le chef du village. Il arrive et nous serre brièvement la main. Mais lorsque Félicité, technicienne en production animale employée par le partenaire A2N qui nous accompagne, lui explique en langue locale que nous venons pour Vétérinaires Sans Frontières, il s’empresse de nous saluer à nouveau et nous remercie avec chaleur.
Les femmes nous offrent des gâteaux aux arachides qu’elles fabriquent sur place et vendent sur le marché. Après quelques présentations, elles nous parlent de leurs chèvres. Ce sont elles-mêmes, au sein de chaque village, qui décident qui en seront les bénéficiaires parmi les plus démunies. Chaque femme désignée reçoit alors cinq chèvres et un bouc. Dès qu’elles auront donné naissance à des petits, les trois premiers seront donnés à une autre famille vulnérable pour perpétuer la chaîne de solidarité.
Nos premières questions tournent autour du lait. Est-ce qu’elles en donnent à leur bébé ? Plus d’un tiers d’entre elles a un enfant dans les bras ou caché derrière l’épaule. Elles rigolent. Non, les chèvres ne produisent pas assez pour cela. Seulement une reconnaît y avoir déjà gouté et déclenche l’hilarité générale. Les langues se délient, et les confidences commencent.
Si elles reconnaissent souhaiter un plus grand cheptel, des abreuvoirs – pour l’instant elles utilisent leurs propres plats pour donner de l’eau aux bêtes – et des abris, c’est le fumier qui, pour le moment, a changé leur vie. Il est utilisé comme engrais organique, et va ainsi enrichir le sol rongé par la désertification et permettre aux plantes de pousser.
Finalement, c’est avec danse et chants qu’elles nous disent au revoir. Juste avant de reprendre la route, l’une d’entre elles nous amène à son champ. Elle y a planté le sorgho local, selon la fameuse technique de fumure. Elle s’y tient bien droite, les mains sur les hanches, devant ses cultures, deux fois plus grandes qu’elle. Deux fois plus grandes que celles du champ voisin.
Alexandra Lionnet, étudiante en médecine vétérinaire
Ce voyage d’échange a été organisé par Vétérinaires Sans Frontières, dans le cadre d’un concours pour les étudiant-e-s en médecine vétérinaire organisé avec le soutien de la coopération belge au développement.