Vétérinaires Sans Frontières en première ligne dans la détection des cas de mpox en RD Congo

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Alors que l’Organisation mondiale de la Santé vient d’en faire une urgence sanitaire mondiale, le virus mpox est déjà présent dans de nombreux pays du continent africain et a été détecté tout récemment en Suède. En République démocratique du Congo, cette zoonose (maladie transmissible de l’animal à l’humain) fait des ravages depuis près de deux ans, en particulier dans les zones forestières. En raison de ses liens étroits avec la République démocratique du Congo, la Belgique doit elle aussi se préparer à l’éventualité d’une propagation du virus sur son territoire.

Au Sud-Kivu, une des deux zones les plus touchées en République démocratique du Congo, Vétérinaires Sans Frontières est en première ligne dans la détection de la maladie. Aux abords du Parc National de Kahuzi-Biega, nous mettons en œuvre un projet One Health avec Médecins du Monde et Action pour le Développement des Milieux Ruraux depuis 2022. Ce projet a vu le jour suite à l’épidémie d’ebola, qui a révélé le manque de dispositif de prévention et de détection des maladies dans la région, d’ailleurs identifiée comme une potentielle zone d’émergence de futures pandémies.

© Thomas Cytrynowicz

C’est pourquoi nous avons mis en place un système d’épidémiosurveillance à base communautaire sur les territoires de Kabare et Kalehe. Celui-ci joue un rôle crucial dans la détection des maladies zoonotiques à potentiel épidémique, notamment le virus mpox mais également d’autres maladies sous surveillance comme la salmonellose, la rage, la cysticercose et la tuberculose. 13 comités locaux y sont actuellement en place, composés de villageois riverains du parc, de populations autochtones (pygmées) et d’agents communautaires des 3 santés : humaine, animale mais aussi environnementale. Ces derniers ont été formés pour surveiller, détecter et remonter les cas suspects. Un système qui a fait ses preuves puisque c’est au niveau de ces comités que les premières alertes ont été données au début de l’épidémie de mpox dans la région. A ce jour, 336 cas ont déjà été diagnostiqués, principalement dans les zones de santé de Miti-Murhesa et de Kalehe.

Une évolution exponentielle

Au Sud-Kivu, l’épicentre de la nouvelle vague de mpox semble se situer dans la zone de santé de Miti-Murhesa, une des trois zones de santé où nous sommes actifs. Sur les quinze premiers jours de septembre, le nombre de cas a pratiquement doublé. La plupart des patients recensés et hospitalisés ont moins de 5 ans, et les cas de mortalité s’observent principalement chez les nourrissons.

Cependant, plusieurs éléments laissent à penser qu’une large proportion de la population adulte pourrait également être atteinte mais ne se manifeste pas :

  • La grande précarité de la population : même si elles présentent des symptômes, beaucoup de personnes ne peuvent pas se permettre d’arrêter de travailler pour se soigner, sous peine de priver toute leur famille de nourriture.
  • La méconnaissance concernant la dangerosité du virus : le souvenir du virus ebola, dont le taux de létalité dépassait les 50 %, est encore vif au sein de la population. Par comparaison, mpox leur semble presque inoffensif.
  • La crainte de la stigmatisation sociale : le virus étant apparu à l’origine dans le milieu des travailleurs du sexe dans la ville minière de Kamituga, les personnes atteintes ont tendance à le cacher par peur d’être stigmatisées.

© Thomas Cytrynowicz

L’évolution rapide de l’épidémie s’explique encore par d’autres facteurs, comme la difficulté d’isoler les patients et la faible capacité locale de prélèvement et d’analyse. Le nombre de cas dépasse largement les capacités de prise en charge des centres de santé, qui n’ont pas les moyens de nourrir les patients. Même infectés, ceux-ci sortent donc quotidiennement de l’hôpital pour se procurer de la nourriture dans leur communauté. C’est également le cas des mères qui accompagnent leurs jeunes enfants malades et partagent leur lit, bien souvent avec d’autres enfants non-infectés. Quant aux patients suspects mais asymptomatiques qui se rendent dans les centres de santé pour y subir des tests, ils sont renvoyés chez eux bien avant que les résultats ne soient disponibles. Lorsqu’ils se révèlent positifs, il est beaucoup trop tard et presque impossible de les retrouver.

Pourquoi l’approche communautaire est-elle essentielle pour lutter contre mpox au Sud-Kivu ?

Les premiers vaccins sont arrivés à Kinshasa et attendent d’être répartis dans les différentes zones touchées à travers la RDC. Mais il apparaît déjà clairement qu’il n’y en n’aura pas pour tout le monde. C’est pourquoi la prévention et la sensibilisation restent cruciales pour endiguer l’épidémie. Et pour y arriver, l’approche communautaire offre les résultats les plus durables.

Les comités One Health mis en place dans le cadre de notre projet regroupent plus de 200 personnes issues des communautés de Kalehe, Kabare et Miti-Murhesa. Toutes ont été sensibilisées sur les comportements à risques et les gestes barrières, et sont chargées de diffuser le message au sein de leurs villages. Elles sont également formées pour reconnaître les symptômes de la maladie. Un maillon essentiel pour atteindre les régions les plus reculées et, on l’espère, stopper la propagation du virus.

Cet article a été mis à jour le 13 septembre 2024 pour rendre compte de l’évolution de l’épidémie.