Au nord-est de l’Ouganda se trouve la région du Karamoja qui, avec une superficie équivalente à celle de la Belgique et une population de 1,2 million d’habitants, doit faire face à de nombreux défis. Des problèmes complexes convergent ici : changement climatique, croissance démographique et conflits entre pastoralistes, c’est-à-dire des éleveurs transhumants.

Depuis 2006, Vétérinaires Sans Frontières intervient dans la région du Karamoja pour améliorer la santé et la productivité de l’élevage, mais aussi offrir davantage d’opportunités économiques aux familles vulnérables. Nos activités visent également une gestion plus efficace des ressources naturelles ainsi que la diminution des conflits. Depuis 2022, nous menons aussi des actions humanitaires.

Une lutte contre le climat et la pauvreté

Dans la région du Karamoja, les éleveurs et les agriculteurs sont confrontés à de nombreux défis, comme le changement climatique, la pauvreté et les conflits. © Tim Dirven

L’irrégularité des précipitations et la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes ont conduit à un risque accru de sécheresses, de famines, d’inondations et d’épidémies. La région du Karamoja est caractérisée par une grande pauvreté, avec des taux élevés de malnutrition, de mortalité infantile, de chômage et d’analphabétisme. La situation politique reste fragile, avec un accès limité aux soins de santé et des conflits persistants causés par la rareté de l’eau et des pâturages.

Les habitants de la région sont des éleveurs pastoraux et des agriculteurs. Tous sont confrontés à des chocs climatiques comme la sécheresse, les précipitations imprévisibles, les inondations et les épidémies de maladies animales. Les familles vulnérables peinent à sécuriser leurs droits fonciers, tandis que les conflits entre communautés se multiplient, alimentés par la concurrence pour l’eau et la terre. La précarité et la pauvreté les conduisent même à se voler du bétail entre eux.

Des solutions innovantes pour gérer le bétail

L’introduction du projet Digital For Development au Karamoja apporte une lueur d’espoir dans cet environnement difficile et instable. Numériser le marquage du bétail profite non seulement aux éleveurs pastoraux, mais facilite également le travail des agents communautaires de santé animale et des services de sécurité. Le projet vise à renforcer la chaîne de valeur de l’élevage, c’est-à-dire tout ce qui est lié au bétail, de la production à la vente, et à promouvoir la paix entre les communautés. Près de 5 000 éleveurs pastoraux, qui possèdent quelque 20 000 bêtes au total, bénéficieront de cette initiative.

Le marquage numérique du bétail contribue à une chaîne de valeur plus durable et favorise la paix entre les communautés. © Tim Dirven

Actuellement, les autorités locales marquent le bétail au fer rouge. Ces marques permettent aux Karimojong, les éleveurs pastoraux du Karamoja, d’identifier leurs bêtes. La méthode traditionnelle n’est cependant pas idéale, car il n’existe aucun lien direct avec le propriétaire et les marques sont souvent trop grandes. Le système numérique va remédier à ce problème en associant les animaux à leurs propriétaires, ce qui simplifiera la gestion du bétail. Les animaux volés pourront ainsi être rendus à leurs propriétaires. Une fonction d’alarme permet en outre d’avertir les éleveurs en cas de pillages, de catastrophes naturelles et d’épidémies. Le système facilitera également le suivi de l’évolution de la santé et de la productivité du bétail.

La numérisation rend les pratiques d’élevage plus transparentes et plus efficaces, contribue à une chaîne de valeur plus durable et aide à lutter contre les maladies et les catastrophes.

Pour un avenir résilient et serein

Nous aspirons à créer un environnement plus paisible et un climat plus favorable à l’élevage au Karamoja. En décourageant les pillages et les vols de bétail et en améliorant la santé animale grâce à des alertes précoces en cas d’épidémies, nous espérons motiver les éleveurs pastoraux à continuer à exercer leur métier et à investir.

Un groupe du forum de femmes pour la paix parcourt la région. Au moyen de pièces de théâtre et de témoignages personnels, elles plaident en faveur de la remise volontaire des armes. © Tim Dirven

Le Fonds Digital For Development soutient la phase de développement de notre projet. Au programme : mise en place d’un système unique de localisation et d’identification pour les animaux et leurs propriétaires, constitution et gestion d’une base de données en ligne et développement d’un logiciel. Nous commençons par le district de Moroto, avec une attention particulière à la sensibilisation et à l’éducation des parties prenantes.

Nous tenons compte des principes du développement numérique et mettons l’accent sur la collaboration avec tous les acteurs impliqués. Ce projet s’intègre par ailleurs aux actions existantes pour promouvoir la paix. La numérisation s’aligne aussi sur la politique actuelle en Ouganda, et sera mise en pratique dans la région du Karamoja. Les ménages vulnérables étant la principale cible de ce système numérique, nous plaidons pour en faire un bien public avec l’implication du gouvernement.

Cette initiative promet non seulement une innovation technologique, mais aussi des avantages concrets pour les communautés locales du Karamoja. Les éleveurs perdront moins de bétail, ce qui améliorera les ventes. Mieux réparties entre les éleveurs transhumants, les terres seront également moins exploitées, ce qui limitera leur épuisement. En impliquant toutes les parties et en utilisant toutes les données disponibles, nous espérons contribuer à un avenir plus résilient et plus serein pour l’ensemble de la région.

La numérisation du marquage du bétail au Karamoja, en Ouganda, est rendue possible grâce au soutien de Ngo-federatie, ACODEV, Fiabel et du Fonds Digital For Development. Nous nous réjouissons de partager nos expériences et de contribuer ensemble au développement durable.